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Hivernage 2007 à Concordia, Antarctique

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AstroConcordia

Expériences scientifiques en Astronomie-Astrophysique 

Les expériences scientifiques menées par notre laboratoire au Dôme C sont en partie liées à la qualification de ce site pour l’astronomie

Pourquoi choisir un bon site d’observation ?

Choisir un bon site d’observation est très important en astronomie. Il ne suffit pas que le ciel soit dégagé pour qu’un site soit déclaré bon. Il faut que l’atmosphère soit relativement ’calme’ car la turbulence atmosphérique dégrade la qualité des images obtenues au sol par un instrument d’observation. A l'instar des paramètres météo qui décrivent l'état de l'atmosphère à un moment donné (température, pression, humidité...), la turbulence atmosphérique est elle aussi caractérisée par un ensemble de paramètres. Le seeing, le temps de cohérence, l'angle d'isoplanétisme, l'échelle externe, etc...

Le ‘seeing’ est  le paramètre caractéristique qu’utilisent les astronomes pour décrire la turbulence atmosphérique. Il mesure la résolution des images en présence de turbulence atmosphérique.  Le seeing est le plus petit détail angulaire que l'on peut voir sur un objet céleste en présence de turbulence atmosphérique.  Les valeurs typiques rencontrées dans les bons sites astronomiques sont de l'ordre de 0.7 seconde d'arc. Un "mauvais seeing" correspond à des valeurs supérieures à 1.5 seconde d'arc. Un  ‘seeing’  exceptionnel  correspond à des valeurs  de l’ordre de 0.3 seconde d’arc.

Images d’un champ d’étoiles obtenues dans des conditions différentes de seeing

Ciel Mauvais Seeing

Ciel Bon Seeing

Ciel hors atmosphère

Mauvais seeing 1.4 seconde d’arc. Lick 3-m, Figer 1995, PhD Thesis

Bon seeing : 0.5 seconde d’arc. Serabyn, Shupe & Figer 1998, Nature, 394, 448

Pas de turbulence atmosphérique. HST/NICMOS 2.4-m Figer et al. 1999, ApJ. 525, 750

Un bon site astronomique doit se situer en altitude loin de toute pollution lumineuse ou autre. Le ciel doit être clair , l’air  sec, l’atmosphère assez ‘calme’ c'est-à-dire très peu de turbulence atmosphérique, avec peu de vents au sol et en altitude et peu d’activité sismique. De plus, le site doit avoir une bonne stabilité climatique et doit être accessible! Le Dôme C présente toutes ces caractéristiques. En plus, il y fait froid, ce qui présente des avantages pour les observations dans l’infrarouge et … des inconvénients pour les instruments qui doivent être conçus pour supporter des températures hivernales très basses, ainsi que des problèmes liés au dépôt de givre sur les optiques des télescopes. Le Dôme C présente aussi une autre caractéristique intéressante, celle liée à la possibilité d’y mener des observations en continu. Cette possibilité est très importante pour plusieurs domaines comme l’astéro-sismologie, ou la recherche de planètes extrasolaires.

Le Dôme C meilleur site astronomique au monde ?

Les premiers résultats obtenus par notre laboratoire ont montré que ce site présente des caractéristiques exceptionnelles. Afin d’avoir une meilleure étude des paramètres de la turbulence atmosphérique, nous poursuivons les observations avec les instruments DIMM, GSM et SSS. Deux nouvelles expériences ont été installées cette année,  l’une (MOSP) dédiée à la caractérisation de la turbulence atmosphérique, l’autre (PAIX) à la caractérisation photométrique du site. Deux autres expériences devront être prochainement installées : GIVRE doit nous permettre d’étudier la formation du givre sur les optiques des télescopes,  et  CIEL  permettra d’étudier  la transparence du ciel dans le domaine visible tout au long de l’hiver.

Les expériences scientifiques de l’hiver 2007

·       DIMM : Differential Image Motion Monitor

DIMM (Differential Image Motion Monitor) est un petit télescope (280 mm de diamètre) équipé d'un masque à deux trous au niveau de son ouverture. Dans notre cas, ces trous font 6 cm de diamètre et sont séparés de 20 cm. L'un des trous est fermé par une lame à faces parallèles, l'autre est équipé d'un prisme à faible déviation (environ 1 minute d'arc) qui permet de former au foyer du télescope deux images de la même étoile. Ces images se déplacent l'une par rapport à l'autre à cause de la turbulence : plus celle-ci est forte, plus les images bougent.

Le principe de la mesure est le suivant : on réalise des séquences de 2 minutes pendant lesquelles on prend des images à courte pose (5 et 10 ms de pose). On calcule ensuite le barycentre des deux images de l'étoile, et on en fait la différence dans les deux directions, X et Y. Ce qui donne des courbes comme l'exemple ci-dessous. Sur ces courbes, on calcule les variances des différences de position, et on en déduit le seeing via un modèle analytique (voir Tokovinin, 2002, PASP, 114, 1156). Deux estimés du seeing sont en fait calculés, ils sont moyennés. L'étape finale du calcul consiste à compenser de la distance zénithale et du temps de pose.

Cet instrument fonctionne en permanence. L’étoile observée est l’étoile Canopus, qui est circumpolaire, c'est-à-dire ne se couche jamais à la latitude du Dôme C. Canopus est assez brillante pour être observée même pendant l’été, ou il fait jour 24h/24.

Etoile Canopus vue par DIMM

L’étoile Canopus observée par DIMM dans de bonnes conditions de seeing

·       GSM : Generalized Seeing Monitor

GSM

GSM ((Generalized Seeing Monitor) est un instrument qui permet de mesurer un autre paramètre de la turbulence atmosphérique. Le principe de cet instrument a été développé dans notre laboratoire dans les années 1990 (Martin et al., 1994, A&A Suppl., 108, 173). Le GSM installé au Dôme C reprend le même principe. On utilise deux DIMM (2 télescopes  de 28 cm de diamètre munis de masques à deux trous), distants de 1 mètre. Au foyer de chaque télescope, une caméra enregistre les mouvements des deux images produites par chacune des deux ouvertures du masque à deux trous. Les images provenant de chaque caméra sont datées à la milliseconde. L’analyse croisée des 4 images stellaires (6 corrélations correspondant aux 6 paires d'ouvertures) permet de remonter, via l'ajustement d'un modèle théorique, aux paramètres de la turbulence (Ziad et al., 2000, Appl. Optics 39, 5415).

L’un des paramètres importants de la turbulence atmosphérique mesuré par  GSM est l’échelle externe qui est une distance mesurée sur le front d'onde de la lumière provenant d'une étoile. C'est la distance à partir de laquelle les fluctuations de phase prises entre deux points du front d'onde se décorrélent.  L’échelle externe est un paramètre qui intervient dans le calcul des systèmes d'optique adaptative (correction en temps réel des déformations de l'image) pour  les grands  télescopes. La valeur de l'échelle externe est typiquement de quelques dizaines de mètres. Le GSM permet de mesurer un autre paramètre important de la turbulence atmosphérique. Ce paramètre est le temps de cohérence qui est le temps caractéristique d'évolution des images en présence de turbulence. Le temps de cohérence est   généralement de l'ordre de quelques millisecondes.

Les deux télescopes de GSM ont été installés pour le premier hivernage. L’instrument a subi quelques modifications pendant la campagne d’été qui a suivi ( structure rigidifiée, installation de paravents …). L’instrument a commencer à donner des résultats dès le début du second hivernage avec notamment les toutes premières mesures d'échelle externe jamais réalisées ici.

·       SSS : Single Star Scidar

SSS

SSS est un instrument  qui  mesure la répartition de la turbulence en fonction de l'altitude. La turbulence est souvent stratifiée en couches qui correspondent généralement aux endroits où les gradients de température et de vitesse de vent sont les plus intenses. Le SSS remplace les sondages in-situ réalisés par des sondes accrochées à des ballons. Son avantage est de pouvoir observer en permanence et de produire un profil de turbulence toutes les quelques minutes (voir figure ci-contre). Les profils enregistrés par les sondes accrochées à des  ballons ont montré  que l'essentiel de la turbulence à Dôme C est concentrée dans les 30 à 40 premiers mètres au dessus du sol. Le SSS  permettra  d'avoir un suivi beaucoup plus complet.

Le SSS permet de mesurer la vitesse de déplacement des couches turbulentes en enregistrant des images prises à différents instants, avec des temps de pose de l’ordre de la milli-seconde. Après analyse, on peut obtenir les caractéristiques de toutes les couches turbulentes en fonction de leur altitude au dessus du télescope. La connaissance des différents paramètres des couches turbulentes depuis l’altitude h=0 jusqu’à 30 km suffit à déterminer tous les paramètres indispensables à la définition et à l’optimisation de toutes expériences en haute résolution angulaire : seeing, angle d’isoplanétisme, temps de vie des speckles

La technique du Scidar (SCIntillation Detection And Ranging) a été mise au point dans les années 1970 (Vernin J., 1973, JOSA 63, 3). Le SSS  ou Single Star Scidar, est le dernier né de cette lignée d'instruments. Il a l'avantage de fonctionner avec des télescopes de petit diamètre (40 cm) lui permettant d'être transporté n'importe où, exactement comme le DIMM.

Schéma SSS

Schéma de principe du SSS

L'instrument lui-même est simple. Une lentille et une caméra, à la sortie du télescope de 406 mm de diamètre. La position de cette lentille et de cette caméra sont calculées pour observer dans un plan qui est près de la pupille du télescope. On observe alors, non pas l’image de l’étoile mais un disque de lumière percé d'un trou sombre au centre (à cause de l'obstruction centrale due au support du miroir secondaire). Cette image est parcourue par des ombres dites "volantes" qui sont produites par la turbulence. L'analyse de ces ombres et de leur évolution dans le temps permet de remonter au profil de turbulence ainsi qu'à la vitesse du vent en fonction de l'altitude.

Les profils de turbulence et de vitesse de vent permettent de calculer les paramètres habituels qui caractérisent la turbulence : seeing, temps de cohérence, angle d'isoplanétisme, taux de scintillation, etc... le SSS est ainsi un instrument complet de qualification de site.

·       MOSP: Monitor of Outer Scale Profile

Mosp

Les profils d'échelle externe est d'une importance capitale pour la mise en oeuvre des systèmes d'optique adaptative (OA) de nouvelle génération qui équiperont les futurs très grands télescopes (ELT). Ces derniers seront certainement équipés d'un système d'optique adaptative, comportant plusieurs miroirs déformables (MD) conjugués sur différentes couches turbulentes, pour faire une correction uniforme dans un très grand champ (OAMC: Optique Adaptative Multi-Conjuguée). La connaissance des profils de l'énergie turbulente et de l’échelle externe est fondamentale pour spécifier et dimensionner les différents étages de ces systèmes d’optique adaptative.

MOSP (Monitor of Outer Scale Profile) est le seul instrument capable d’extraire les profils d'échelle externe. Le principe de l’instrument est basé sur la mesure des fluctuations d’Angle d’Arrivée (AA) à différentes séparations angulaires par observation du bord lunaire. Il s'agit d'utiliser les corrélations spatio-angulaires de ces fluctuations pour scanner les conditions de turbulence dans différentes couches de l'atmosphère. L’instrument consiste en un petit de télescope (40cm de diamètre) équipé d’une caméra CCD et d’une lentille de Barlow pour élargir la focale et donc augmenter la sensibilité du moniteur aux fluctuations du bord lunaire.

·       PAIX : Photometer AntarctIc eXtinction

PAIX est une caméra qui permet de mesurer la qualité photométrique du ciel nocturne du Dôme C. Cette caméra est utilisée uniquement  pendant les nuits sombres (sans lune). Elle est  installée sur le même télescope, en alternance avec la caméra MOSP.

·       GIVRE :

Givre - CEA

Givre - LUAN

L'échelle 'CEA' de GIVRE ... ... et l'échelle 'LUAN'

GIVRE est une expérience développée par le CEA, en collaboration avec le LUAN, pour étudier la formation du givre. Deux ‘échelles’, l’une (CEA) située à un mètre du sol, l’autre (LUAN) sur l’une des plateformes AstroConcordia, sont équipées chacune de disques et de cylindres dont les températures sont contrôlées par ordinateur. Le principe consiste à observer la formation du givre et sa disparition sur les disques et cylindres en faisant varier différents paramètres que sont les différences de température entre les cylindres ainsi les périodes et durées de chauffage.

·       SONICS : Anémomètres Soniques

C'est une expérience qui permet de qualifier la turbulence atmosphérique sur les 30 premiers mètres. Elle a été développée par Tony Travouillon du CIT (California Institute of Technology) et installée sur une tour de 30 m de haut, à environ 1 km des principaux bâtiments de la base. On utilise trois anémomètres installés respectivement à 10, 20 et 30 m du sol sur une tour. Chaque anémomètre est constitué de 3 paires 'émetteur-récepteur'. Le principe est le suivant: Chaque émetteur envoie vers le récepteur un faisceau d'ultrasons de fréquence connue. En se propageant dans l'air ces ultrasons subissent un décalage en fréquence dû à l'effet Doppler produit par le vent. Connaissant le décalage en fréquence, on remonte à la vitesse du vent dans la direction de la mesure. Chaque paire d'un anémomètre mesure donc une composante du vecteur vitesse du vent. Il est donc possible de mesurer la vitesse du vent en 3 dimensions. L'appareil mesure également la température. A l'aide d'un modèle théorique, on arrive à  partir des mesures effectuées à déduire un paramètre important de la turbulence locale.

Sonics - Tour

Sonics : Sonde

Sondes 2 et 3 sur la tour de 30 mètres

Une des sondes  SONICS

Cette expérience est complètement automatique. La seule inquiétude réside dans le dépôt de givre sur les sondes, empêchant ainsi la mesure. Un système de chauffage a été installé pour dégivrer les sondes et éviter d'avoir à le faire à la main en grimpant sur la tour. Pour effectuer une mesure, on doit donc chauffer les sondes pendant un certain temps, attendre 1 ou 2 minutes et faire une série de mesures. La difficulté réside dans le choix des paramètres – durée, fréquence du chauffage et durée de la mesure. Pendant le mois de février, j'ai expérimenté un certain nombre de paramètres avant de trouver une solution. J'espère que cette solution sera valable pendant toute la durée de l'hivernage.

·       SKY-CAM 

SKY-CAM est une caméra grand champ (120 degrés) qui permet en observant le ciel en continu d'en déduire la transparence et/ou la couverture nuageuse. 


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Djamel MEKARNIA -  AstroConcordia -  Dôme C