Les travaux de l'équipe de Planétologie ont pour thème principal la formation et l’évolution des systèmes planétaires. Ils se caractérisent ainsi par un large éventail d’études dans les domaines concernés, dans un esprit de cohérence et de complémentarité. Ces travaux couvrent un ensemble de domaines qui vont de l’origine des systèmes planétaires, incluant notamment l’évolution des disques proto-planétaires et la formation des premiers solides puis des planètes, jusqu’à l’évolution du Système Solaire actuel et des exo-planètes. A l'intérieur du laboratoire une synergie est en cours, notamment avec l'équipe de Fluides, Plasmas et Turbulence sur la dynamique des particules ou de poussières dans des disques protoplanétaires. Les travaux de l’équipe reposent aussi bien sur des méthodes numériques qu’analytiques et sur la participation à des projets au sol et dans l’espace dont certains membres de l’équipe ont été parmi les porteurs. Citons par exemple le projet A-step au Dôme C et la mission spatiale de retour d’échantillon d’un astéroïde Marco Polo. Certains résultats ont fait l'objet d'une large médiatisation par l’intermédiaire de communiqués de Presse du CNRS et de l’INSU, de publications dans différents journaux grand public et d’émissions de radio et de télévision auxquelles se rendent fréquemment certains membres de l’équipe. Il faut ainsi souligner que certains d’entre nous consacrent une partie relativement importante de leur temps à la diffusion des connaissances et à la médiatisation. Enfin, plusieurs distinctions ont été obtenues, comme le Prix HP/AMD Jeunes Chercheur 2006 de la SF2A, le Prix Urey 2006 de la Division des Sciences Planétaires (DPS) de l’American Astronomical Society (AAS), le Prix Zeldovitch 2006 du COSPAR et le Prix Mergier-Boureix 2009 de l’Académie des Sciences.


I Un scénario cohérent de l’histoire précoce du Système Solaire

La proximité à leur étoile des planètes extra-solaires dites « Jupiters chauds » (planètes de type Jovienne, avec un rayon orbital inférieur à celui de l’orbite de Mercure) suggère qu’elles ont subi un processus de migration depuis de plus grandes distances. Or, cela ne semble pas être le cas de nos planètes géantes qui sont restées loin du Soleil en évitant ce processus de migration qui semble pourtant systématique. Avec un code hydrodynamique développé au sein de notre équipe (Crida et al., 2007), nous avons étudié en détail l’évolution des planètes géantes du Système Solaire dans la phase dominée par la présence du disque de gaz. Nous avons montré que la migration de Saturne vers le Soleil est plus rapide que celle de Jupiter. Les orbites des deux planètes s’approchent jusqu’à atteindre la résonance 3:2, configuration dans laquelle la période orbitale de Saturne est égale à 1,5 fois celle de Jupiter. Dans cette configuration, la direction de la migration s’arrête pratiquement (Morbidelli et Crida, 2007). Uranus et Neptune sont alors à leur tour piégées en résonance avec Saturne, ce qui arrête également leur propre migration. Nous avons ainsi montré que les planètes atteignent une configuration dans laquelle chaque planète est en résonance avec ses voisines (Morbidelli et al., 2007). Cependant, ces configurations dîtes multi-résonnantes ne correspondent pas à la structure orbitale actuelle des planètes géantes. En effet, actuellement les planètes ne sont pas en résonance et leurs séparations orbitales, ainsi que leurs excentricités et inclinaisons, sont bien plus grandes que celles qui caractérisaient la chaîne de résonances décrite ci-dessus. Comment alors les planètes ont-elles pu acquérir leur configuration orbitale actuelle ? Nous avons montré qu’après la disparition du gaz, l’évolution des orbites des planètes n’est pas encore terminée. Un disque massif de planétésimaux, dit trans-neptunien, est supposé exister au-delà de l’orbite de Neptune. La faible interaction gravitationnelle entre Neptune et ce disque conduit les planètes à s'échapper de leurs résonances mutuelles originelles, après un temps de plusieurs centaines de millions d'années (Gomes et al., 2005; Levison et al., en préparation). Quand ceci a lieu, le mouvement des planètes devient subitement instable. Nous avons démontré, en analysant les orbites actuelles de Jupiter et Saturne (Morbidelli et al., 2009), des planètes telluriques (Brasser et al., 2009) et des astéroïdes de la ceinture principale (Brasser et al., 2010), que cette phase d'instabilité a été très violente: non seulement Saturne et Jupiter ont eu des rencontres proches avec Uranus et Neptune, mais aussi ces deux dernières planètes ont à leur tour eu des rencontres mutuelles. Ainsi, Uranus et Neptune, devenues très excentriques, ont pénétré dans le disque trans-Neptunien et l'ont dispersé entièrement. Avec un disque de planétésimaux de 35 masses terrestres étendu jusqu’à 35 Unités Astronomiques (UA), l'interaction proche de ces planètes avec le disque conduit celles-ci vers leurs orbites actuelles. Ce scénario explique la structure orbitale actuelle des planètes géantes (Tsiganis et al., 2005) mais aussi reproduit en même temps d’autres phénomènes autrement inexpliqués. Ainsi, nous estimons que la dispersion rapide mais tardive du disque des planétésimaux explique pour la première fois l’origine du mystérieux « Grand Bombardement Tardif » (Gomes et al., 2005). Ce bombardement correspond à un sursaut du taux d’impacts planétaires (d’intensité 20.000 fois supérieure à celle du bombardement actuel dû aux astéroïdes géocroiseurs) qui s'est déclenché soudainement, 650 millions d'années après la formation des planètes et qui est responsable de la formation des bassins lunaires. L’évolution du Système Solaire décrite par notre modèle reproduit ce bombardement et explique également l’origine et les propriétés actuelles de: (i) la ceinture de Kuiper (le reliquat du disque trans-Neptunien originel) (Levison et al., 2008), (ii) les satellites distants (dits « irréguliers ») des planètes géantes (Nesvorny et al., 2007), (iii) la population des astéroïdes Troyens de Jupiter qui évolue sur la même orbite que la planète aux points de Lagrange du problème à 3 corps (Morbidelli et al., 2005) et (iv) la capture d'objets de nature cométaire dans la ceinture principale des astéroïdes (Levison et al., 2009).

Enfin, dans le cadre de l'étude de l'origine et du mouvement des comètes à moyennes et longues périodes, nous avons mis en évidence un mécanisme de synergie pour transporter des comètes du nuage de Oort vers la région observable (distances périhéliques < 5 UA) quand les perturbations de la marée galactique et des étoiles passantes agissent simultanément. En fait nous avons montré (Rickman et al. 2008) que les étoiles ont un rôle prédominant, plus particulièrement les étoiles massives (masse de l'étoile supérieure à 1,2 masse solaire).

II Petits corps du Système Solaire: Processus de destruction, propriétés physiques et missions spatiales

II.1 Processus de destruction: influence de la porosité et origine des astéroïdes doubles

Les petits corps du Système Solaire (astéroïdes, comètes) sont caractérisés par des propriétés physiques variées et leurs réponses aux impacts qu’ils subissent ainsi que leur durée de vie dépendent fortement de ces propriétés. Nos travaux précédents avaient permis de caractériser par simulation numérique le résultat d’une destruction d’un astéroïde ne contenant pas de microporosité et de reproduire avec succès la formation des familles d’astéroïdes générées par la destruction d’un tel corps. Or les comètes et les astéroïdes de type spectral sombre (e.g. type carboné C), de par leur faible densité volumique, sont supposés être constitués de matériaux microporeux et il est donc important de caractériser l’influence de cette microporosité sur le processus d’impact. Ces dernières années, avec notre étudiant en thèse M. Jutzi (soutenue en Février 2009) nous avons développé un modèle de fragmentation de corps poreux, qui met en jeu non seulement l’activation et la propagation de fissures comme dans un corps non poreux, mais aussi l’écrasement des pores (compaction) qui introduit une source de dissipation d’énergie additionnelle (Jutzi et al. 2008). Pour la première fois, un tel modèle a subi une comparaison détaillée et réussie avec des expériences en laboratoire menée au Japon sur de la pierre ponce (Jutzi et al. 2009). Les résultats ont montré que la présence de microporosité influence fortement le processus d’impact et les propriétés des fragments générés sont sensiblement différentes de celles des fragments issus d’un corps non poreux (voir Fig. 1). La prochaine étape est d’appliquer ce modèle à grande échelle pour caractériser les seuils d’énergies de destruction des petits corps en fonction de leur taille et de leur porosité, simuler la formation de famille d’astéroïdes de type sombre et d’objets de Kuiper, en tenant compte de la gravité non négligeable à ces échelles.

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Figure 1: Images 2D de simulations 3D de destruction d’un astéroïde de 100 km de diamètre suite à l’impact d’un projectile. Haut : corps non-poreux ; bas : corps poreux (25% de porosité). Les propriétés physiques des deux corps diffèrent seulement par la présence ou l’absence de porosité. Les couleurs du jaune au rouge représentent des vitesses positives du matériau, la couleur bleue indique une vitesse négative. Les images montrent les instants t=25 s, 50 s et 100 s après l’impact de gauche à droite et montrent clairement une différente réponse de l’objet en fonction de sa porosité (l’objet poreux subit une compaction).

Un autre processus de destruction a été étudié et a permis d’expliquer l’origine des astéroïdes doubles qui constituent 15% des populations des géocroiseurs et de la Ceinture Principale. Ce processus est une destruction par excès de rotation sur lui-même d’un astéroïde. Un effet thermique appelé YORP qui tient compte de l’éclairement du Soleil, de la forme de la surface de l’astéroïde, et du taux d’absorption du rayonnement par cette surface peut augmenter ou diminuer le taux de rotation des astéroïdes de taille kilométrique. Nous avons simulé l'augmentation du taux de rotation d'un astéroïde causé par cet effet, en représentant l'objet par un agrégat composé de sphères liées par gravité, hypothèse en accord avec nos travaux sur les impacts et les observations. Nous avons montré que lorsqu’un corps de ce type se met à tourner de plus en plus vite, certaines particules descendent du pôle vers l'équateur et l’astéroïde perd de ces morceaux depuis son équateur, là où la force centrifuge est la plus élevée. Ces particules, qui s'échappent, vont se réaccumuler pour former un satellite. Le primaire du fait de l’aplatissement de ses pôles, contrebalancé par l’échappement de matière au niveau de l’équateur, aura une forme approximativement sphérique. Les particules s’échappant pourront sous certaines conditions se réaccumuler d’une manière stable. Le résultat final sera un astéroïde double, composé d'un primaire assez sphérique et d'un secondaire dont la taille et l’orbite autour du primaire sont similaires à celles observées. Le résultat final est même très similaire à l'image radar du binaire 1999 KW4 (Fig. 2).

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Figure 2: A gauche : images radar de l’astéroïde binaire 1999KW4 (Ostro et al. 2005) ; à droite : image finale d’une simulation de formation d’un astéroïde binaire par fragmentation rotationnelle. La simulation reproduit avec succès les propriétés physiques des binaires observés.

Ce résultat a fait l’objet d’un article (Walsh et al. 2008) et d’un
communiqué de presse de l’INSU.

II.2. Une explication générale des formes des astéroïdes observées

Nos simulations de destructions d’astéroïdes ont montré que les gros fragments d’une collision destructrice sont le résultat de la réaccumulation de fragments plus petits attirés par leurs attractions mutuelles tandis qu’ils sont éjectés de leur corps parent (Michel et al. 2001, Science 294, 1696). La plupart des astéroïdes de seconde génération (issus de la destruction d’un corps plus gros) seraient donc des agrégats gravitationnels, ce qui pourrait expliquer les densités volumiques faibles mesurées par les sondes spatiales. Nous nous sommes interrogés sur l'origine des formes des astéroïdes, en considérant qu'ils sont des agrégats qui, une fois formés, sont soumis à l'action de l'environnement spatiale (impacts non destructifs, forces de marée, etc). Nous avons suivi une approche à la fois théorique et numérique. Du point de vue théorique, nous avons montré que la différence entre les formes observées des petits corps pourtant solide et les formes d'équilibre d’un corps fluide auto-gravitant est très petite en terme d'énergie potentielle sur la surface. En effectuant une exploration numérique détaillée, nous avons mis en évidence le chemin évolutif qu'une forme arbitraire pourrait suivre pour minimiser le potentiel, en arrivant ainsi à un état d'équilibre plus stable et plus proche de l'équilibre prévu pour le fluide. Cet état fluide ultime n'est cependant jamais atteint en présence d'une petite résistance mécanique interne du matériau. La distribution des formes obtenues explique d'une façon immédiate et naturelle la distribution des formes observées des petits corps. Elle est aussi en accord avec les formes - jamais lointaines de l'équilibre fluide - d'objets observés en détail par les sondes spatiales. Nos résultats on fait l'objet d'un article (Tanga et al 2009) et d'un
communiqué de presse de l’INSU.

II.3. Projet de mission spatiale de retour d’échantillons d’un astéroïde primitif

En 2007, un membre de l’équipe a été co-lead proposant de la mission spatiale Marco Polo (en partenariat avec l’agence spatiale japonaise JAXA) de retour d’un échantillon d’un astéroïde primitif au programme Cosmic Vision 2015-2025 de l’ESA. La mission a été sélectionnée dans le programme de classe M avec 6 autres missions (parmi plus de 60 propositions) pour une étude de faisabilité qui s’est déroulée jusqu’à l’automne 2009 à laquelle nous avons participé comme co-lead de l’équipe scientifique mandatée par l’ESA. Suite à cette étude, le coût estimé de la mission ne lui a pas permis d’être sélectionnée comme mission de classe M pour la deuxième phase de définition. En revanche, il a été recommandé par les comités de sélection d’explorer la possibilité d’une contribution européenne comme mission d’opportunité à une mission de retour d’échantillon d’une autre agence spatiale. Une telle mission, appelée OSIRIS-REx, vient d’être pré-sélectionnée dans le programme New Frontiers de la NASA, et une autre mission est aussi en phase de sélection à la JAXA. Grâce à un accord trouvé avec des partenaires américains, nous venons de soumettre une nouvelle proposition à l’appel Cosmic Vision 2 de l’ESA pour les missions de classe M3 (3 Décembre 2010).
Cliquer ici pour avoir plus d’information sur cette nouvelle proposition appelée MarcoPolo-R.

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III La Planète Mercure: Rotation et modèle de noyau interne

Dans la procédure de préparation des missions spatiales à destination de Mercure (e.g., la mission Bepi Colombo de l’ESA), l’obliquité de Mercure était prévue constante. Nos travaux ont montré qu’elle est en fait le siège de librations liées aux interactions planétaires (amplitudes ± 2 as, et d’obliquité moyenne 1.98 amin ; Bois et Rambaux 2007). De plus, Mercure est composée d’un noyau dont le nature est énigmatique et nous avons déterminé que ce noyau est fluide et qu’il contient du soufre (Rambaux et al. 2007). La revue La Recherche s’est fait l’écho de la découverte concernant le noyau, résultat corroboré par une autre équipe américano-russe et de plus compatible avec les observations radars actuelles (La Recherche 410, juillet-août 2007 et La Recherche 415, janv. 2008, pour les deux résultats). Un programme informatique, SONYR (Spin-Orbit N-bodY Relativistic model), dont nous avons contribué au développement a permis d’obtenir ces résultats. SONYR n’est pas un modèle Newtonien doté de corrections relativistes, mais il est directement écrit dans un formalisme relativiste résultant d’une résolution des équations d’Einstein à un niveau Post-Newtonien d’ordre 1. De part cette structure relativiste et sa généralisation spin-orbite, SONYR est un modèle unique au monde pour le Système Solaire. Il inclut de surcroît les couplages rotation-noyau des planètes telluriques. Les thèmes innovant ouverts par ces recherches ces dernières années sont donc la rotation comparée des planètes telluriques, en prenant en compte leur structure interne et les couplages rotation-noyau, et la planétologie relativiste grâce à la réalisation du programme SONYR qui constitue le premier modèle relativiste à N-corps spin-orbite pour le Système Solaire.

IV Les géantes de notre Système Solaire

L’étude des planètes géantes de notre Système Solaire s’est poursuivie à un rythme moins soutenu que les années précédentes, une grande partie de cette activité ayant été orientée vers l'étude des exoplanètes. Nous avons cependant poursuivi l'étude de la structure interne de Jupiter dans le cadre de la participation en tant que CoI à la mission NASA Juno, avec le soutien du CNES. Juno sera lancée en août 2011 vers Jupiter qu’elle atteindra en 2016 pour une mesure extrêmement fine de ses champs gravitationnel et magnétique. D’autre part, nous avons contribué à une proposition de mission vers Saturne dans le cadre de l’appel d’offres Cosmic Vision de l’ESA. Cette mission, KRONOS, consistait en l’envoi de sondes dans l’atmosphère de la planète pour des mesures in situ de la composition de l’atmosphère dans le cadre d’une recherche de l’origine du système solaire (Marty et al. 2009, voir aussi Guillot et al. 2009). Le projet n’a pas été sélectionné, mais un projet similaire est à l’étude du coté américain. D’un point de vue théorique, nous avons lié le modèle d’évolution dynamique du Système Solaire (modèle « de Nice ») à une étude de l’enrichissement des enveloppes des planètes géantes. Cette étude montre que l’enrichissement lié au bombardement lunaire tardif n’est pas significatif (Matter, Guillot & Morbidelli 2009).

V Exoplanètes: De la modélisation à l’instrumentation

Par rapport aux années précédentes, notre activité théorique sur la caractérisation des exoplanètes a naturellement évolué vers l’interprétation d’observations de plus en plus nombreuses, mais aussi vers l’implication dans des projets instrumentaux. Ainsi, le lancement réussi du satellite CoRoT en décembre 2006 a amené la découverte de nouvelles planètes en transit devant leur étoile, depuis CoRoT-3b (Deleuil et al. 2008), une naine brune vingt fois plus massive que Jupiter jusqu’à CoRoT-7b (Léger et al. 2009, Queloz et al. 2009), première super-Terre en transit connue. Notre participation dans CoRoT a été active, tant du point de vue de l’interprétation de ces résultats (voir liste de publications sur https://corotpub.oca.eu/), la suggestion de nouvelles observations (HD46375- une étoile à planète sans transit pour la détection de la lumière réfléchie), ainsi que la participation au comité scientifique de la mission. Un des résultats marquants a été l’analyse détaillée de la structure de CoRoT-7b, faite lors du séjour à l’OCA de M. Ikoma (Tokyo Institute of Technology) en 2009, et qui a permis de montrer à la fois la structure essentiellement rocheuse de cette planète, mais aussi la présence de volatils et son évaporation marquée (Valencia et al. 2010). Nous avons aussi pu contraindre précisément les caractéristiques de l’étoile CoRoT-9 et la composition de « sa » planète géante, première planète en transit « tempérée » (95 jours de période, excentricité modérée) dont la structure n’est pas affectée par les effets de marée. CoRoT-9b a une composition similaire à celle de Jupiter, avec environ 20 masses terrestres en éléments lourds (Deeg et al. 2010). Nos techniques de modélisations ont ainsi évolué à la fois vers la possibilité de considérer les petites planètes grâce à l’expertise de D. Valencia (post-doctorante Poincaré à l’OCA, novembre 2008-2010), et vers l’analyse combinée de l’évolution planétaire et de l’évolution stellaire (thèse de M. Havel, 2007-2010). Sur le plan de l’analyse globale des exoplanètes en transit connues, nous avons confirmé la corrélation entre métallicité stellaire et quantité d’éléments lourds dans les exoplanètes (Guillot 2008). Nous avons aussi, dans le cadre de la thèse de F. Fressin (soutenue en 2007) élaboré des outils permettant d’étudier la statistique des découvertes de planètes en transit (Fressin et al. 2007, 2009).

D’autre part, depuis 2005 nous nous sommes impliqués avec le laboratoire Fizeau et d’autres partenaires dans le projet ASTEP (Antarctic Search for Transiting Exo-Planets) visant à caractériser le site de Concordia, Antarctique pour la photométrie de haute précision et la caractérisation d’exoplanètes. Le projet a été financé par l’ANR (2006-2009). Il s’est développé en deux phases : ASTEP Sud, une lunette pointant fixement le champ du pôle Sud céleste a été installée à Concordia dès décembre 2007 pour observer en continu durant les hivers australs 2008 et 2009. ASTEP 400, un télescope automatisé de 40cm a été conçu, fabriqué, testé à Nice pour être installé à Concordia fin 2009. Le télescope a eu sa première lumière (de jour) sur le ciel antarctique le 29 novembre 2009, et est fin prêt pour la saison 2010 qui s’approche. L’analyse des données 2008 de ASTEP Sud a été réalisée dans le cadre de la thèse de N. Crouzet (2006-2010) et a permis de confirmer l’excellente météorologie du site de Concordia, avec entre 58 et 69% de conditions météorologiques excellentes (Crouzet et al. 2010).

VI Les jets stellaires: Acteurs dynamiques de la formation planétaire

Les jets stellaires sont des phénomènes omniprésents lors de la formation stellaire et planétaire. Leur influence dynamique est connue uniquement à travers deux processus: l'évacuation de l'excès de moment cinétique du disque protoplanétaire et de l'étoile ainsi que le transport des matériaux de hautes températures dans les zones lointaines et froides des systèmes planétaires. Nous avons découvert un troisième processus par lequel les jets stellaires influencent activement la formation planétaire : la perte asymétrique de moment linéaire observée dans la plupart des jets stellaires induit une accélération différentielle entre l'étoile, le disque et les planètes qui s'y forment (Namouni 2007). Cette accélération force le profil médian du disque à prendre la forme d'un sombréro dans la direction du jet le plus faible modifiant ainsi l'illumination du disque. Cette asymétrie de profil induit la stratification du disque et empêche son équilibre hydrostatique ce qui résulte en un nouveau type de vent hydrodynamique apparaissant d'un seul côté du disque comme celui observé dans le système HH30. La variabilité temporelle des jets induit des contractions et expansion radiales globales qui chauffent le disque et détermine le rayon de troncature externe du système (Namouni et Guzzo 2007). L'accélération différentielle affecte également les planètes en formation et pourrait expliquer la grande excentricité des orbites exoplanétaires (Namouni 2005, Namouni et Zhou 2006). En effet, l'excentricité médiane de 27% est bien plus grande que celle de Jupiter, 5%. Nous avons montré que l'accélération induite par les jets pourrait expliquer les grandes excentricités observées, l'absence de grande excentricité dans les orbites des planètes du Système Solaire ainsi que les configurations orbitales multiplanétaires. La richesse des phénomènes dus à l'action dynamique des jets stellaires nous a poussé à chercher ses contreparties dans les systèmes galactiques où les jets sont également importants. En particulier, nous avons montré que les accélérations induites par les vents galactiques contribuent à la diffusion stellaire dans les galaxies à disque (Namouni et al 2008).

VII Mécanismes de diffusion

Nos résultats les plus marquants concernent la recherche des mécanismes de diffusion, thème d'actualité dans le domaine des systèmes dynamiques, étudié en collaboration avec Massimiliano Guzzo (Univ. de Padoue). Précisément, nous avons montré numériquement que le mécanisme introduit par Arnold sur un modèle ad-hoc pour expliquer la diffusion lente se généralise à toute une classe des modèles (Guzzo et al. 2009a). Dans ce même travail nous avons montré que la diffusion d'Arnold se comporte en bonne approximation comme un processus Markovien, justifiant le calcul des coefficients de diffusion (thème jusqu'à la débattu). Sur une autre classe des modèles, dites « a priori stable », pour lesquels manque totalement un mécanisme de diffusion (qui est pourtant observée numériquement), nous avons donnée pour la première fois une description de la topologie des variétés hyperboliques (structures porteuses du chaos et de la diffusion) et nous avons montré une corrélation entre les transitions de topologies observées et le coefficient de diffusion d'Arnold (Guzzo et al. 2009b). Parallèlement à ce travail qui concerne les systèmes Hamiltoniens nous avons entamé l'étude de la stabilité dans les systèmes dissipatifs (Celletti et al. 2006) plus particulièrement le problème de l'interaction spin-orbite (Celletti et al. 2007) ainsi que récemment le problème de trois corps. Ce domaine est en pleine expansion grâce aux récents résultats théoriques de type KAM qui, jusqu'à maintenant étaient l'apanage des systèmes conservatifs.

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Figure 3: Mise en évidence, par des méthodes géométriques, des variétés hyperboliques, c'est-à-dire de l'ensemble des points de l'espace de phases asymptotiques à un point hyperbolique. Le modèle paradigme est un système Hamiltonien décrivant deux pendules couplés. Dans la figure la couleur jaune indique les points appartenant à l'intersection entre la la variété hyperbolique 4D et un plan opportunément choisi. Une figure à forme de fleur centrée sur le point d'intersection des résonances apparaît être caractéristique de la topologie de ces variétés (Guzzo et al. 2009b).